Progrès de la recherche sur les touristes atteints de troubles mentaux : une analyse critique et la voie à suivre.

Troubles mentaux et tourisme

Les troubles de santé mentale sont de plus en plus reconnus comme un défi majeur en matière de santé mondiale. Selon l’Organisation mondiale de la santé, environ 12,5 % de la population mondiale est touchée par des troubles mentaux tels que la dépression, l’anxiété, le trouble bipolaire, la schizophrénie et le syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Ces troubles perturbent considérablement les processus cognitifs, émotionnels et comportementaux des individus, entraînant des altérations de leur fonctionnement quotidien et de leur bien-être. La pandémie de COVID-19 a exacerbé cette crise, avec une augmentation significative de l’anxiété et de la dépression.

Le tourisme, souvent loué pour ses bienfaits sur le bien-être, offre non seulement des récompenses émotionnelles à court terme, mais aussi des améliorations à long terme de la santé mentale. Des études montrent que les activités touristiques peuvent stimuler les fonctions cérébrales et procurer un sentiment de satisfaction dans la vie. Cependant, les recherches existantes sur les bienfaits du tourisme sur le bien-être se sont largement concentrées sur des individus neurotypiques et en bonne santé physique. Les besoins des touristes souffrant de troubles mentaux ont été largement négligés, malgré leur présence croissante sur le marché.

Lacune de la recherche

La recherche se concentre sur les touristes souffrant de troubles mentaux et les défis auxquels ils sont confrontés dans l’industrie du tourisme. Ces personnes sont confrontées à la stigmatisation, à la discrimination et à l’exclusion, qui peuvent toutes entraver leur capacité à accéder aux services touristiques. L’évolution des besoins de ces touristes, en raison de leurs troubles mentaux, nécessite une approche plus inclusive et plus flexible de la prestation de services touristiques. L’absence de services touristiques inclusifs a des implications importantes non seulement pour les personnes concernées, mais aussi pour l’industrie du tourisme.

Cette recherche est essentielle car elle permet de comprendre de manière exhaustive l’état actuel de la littérature sur les touristes souffrant de troubles mentaux. En proposant un modèle de gestion du tourisme inclusif, l’étude présente des stratégies visant à améliorer l’expérience touristique de ce groupe mal desservi, et propose des recommandations pratiques à l’intention de l’industrie du tourisme, des décideurs politiques et des aidants.

L’étude met en évidence une lacune importante dans la littérature concernant les touristes souffrant de troubles mentaux. Les recherches sur ce sujet ont été fragmentées, les études se concentrant sur des troubles spécifiques (par exemple, l’autisme, la dépression, la démence) ou des aspects particuliers de l’expérience touristique (par exemple, l’accessibilité, les responsabilités des aidants, les infrastructures), mais sans cadre intégré et holistique. Comme l’indique la recherche, « la diversité des troubles mentaux, chacun caractérisé par des besoins et des expériences distincts, conduit à un paysage de recherche décousu ».

Approche des parties prenantes

Cette étude adopte une approche axée sur les parties prenantes, qui comprend trois groupes principaux : les touristes et les aidants, les prestataires de services touristiques, et les gouvernements et les entités tierces. La recherche examine de manière critique les études existantes, en synthétisant les connaissances de ces groupes de parties prenantes afin de développer un modèle de gestion du tourisme plus inclusif. Cette approche reconnaît que « chaque partie prenante joue un rôle important dans la façon dont les expériences touristiques sont vécues ». Le modèle met l’accent sur la nécessité d’une coopération entre les parties prenantes pour garantir que les services touristiques soient accessibles, favorables et enrichissants pour les personnes souffrant de troubles mentaux.

Modèle de gestion du tourisme inclusif

L’une des principales contributions de cette recherche est le développement du modèle de gestion du tourisme inclusif. Ce modèle intègre les rôles et les responsabilités des principales parties prenantes et propose des stratégies pour surmonter les obstacles aux voyages rencontrés par les touristes atteints de troubles mentaux. Il repose sur le constat que, comme l’a noté un participant à l’étude, « les touristes souffrant de troubles mentaux connaissent souvent des perturbations de la régulation émotionnelle, des processus cognitifs et du comportement, ce qui rend le voyage une expérience accablante » (Hu et al., 2024). Le modèle appelle à une évolution vers la conception d’expériences touristiques inclusives qui tiennent compte des besoins et des défis spécifiques de ces touristes, notamment des caractéristiques d’accessibilité, des hébergements appropriés et des services de soutien.
 
Ce texte s’inspire de l’article Progress in research on tourists with mental disorders: A critical review and the way forward, écrit par Yangyang Jiang, Cenhua Lyu et Balaji Makam S., publié dans Tourism Management (vol. 107, 2025).

Balaji Makam S. était professeur de marketing à l’École de commerce de Rennes. Ses recherches portent sur le marketing des services, l’expérience client et la transformation numérique. Il étudie comment les entreprises peuvent améliorer l’accessibilité et l’inclusivité pour divers segments de consommateurs.